…nous discutions
à l’origine de l’inefficacité des Missiles Sol-Air (MSA) fabriqués par les
Russes et déployés au Nord Vietnam. Ces armes de défense aérienne suivent un
« fil » invisible ou un rayon radar après que le rayon a été renvoyé
par la surface d’un aéronef. À la fin 1965, plus de 150 MSA russes avaient été
lancés contre des aéronefs américains : seuls neuf ont atteint leur cible.
Le taux de « réussite » était encore pire à l’été 1966. Nos pilots
avaient appris comment éviter les SMA en plongeant en-dessous d’eux lors de
leur approche ou en volant bas vers une cible permettant de perturber le
système de guidage radar – qui percevrait un tas d’objets dans le paysage et
les confondrait avec les avions.
Un exemple parfait de
l’inefficacité des MSA soviétiques a eu lieu le 17 juin 1966. Trois F-100 Super
Sabre de l’Armée de l’Air US attaquaient des cibles près de Vinh, à environ 260
km à l’intérieur du Vietnam Nord. Trois MSA furent lancés dans leur direction.
Les pilotes des F-100 plongèrent sous les missiles soviétiques et, à l’aide du
plus petit missile américain Bullpup GAM-83 – également un missile suivant un
rayon, de l’air au sol – détruisirent les camions radar qui guidaient les MSA.
Les missiles russes explosèrent sans faire de dégâts 300 m au-dessus des pilotes des
F-100.
Les MSA sont l’une des
principales attractions des parades soviétiques lors des jours fériés depuis
des années. L’agence de presse russe, TASS, en disait ceci : « Ils
sont capables d’atteindre tous les types d’avions modernes volant à n’importe
quelle altitude et à n’importe quelle vitesse. »
Il faut ajouter que le F-100
Super Sabre, bien qu’il soit un bon engin, n’est plus considéré comme moderne
par l’Armée de l’Air US. En fait, il est obsolète selon les standards actuels.
Si l’Union Soviétique ne peut
concevoir des MSA de courte portée avec une précision mortelle intégrée,
comment peuvent-ils produire des ICBM de longue portée des centaines de fois
plus difficiles à guider ?
…
Historiquement, le MSA M-2 russe
est en vérité le MSA « Rhine Maiden » [Vierge du Rhin] allemand. Les
« concepteurs » soviétiques prirent simplement les schémas allemands
datant des années 1940, et essayèrent de les moderniser afin de produire leurs
MSA. Ils firent la même chose avec d’autres fusées qui avaient été conçues par
des ingénieurs allemands forcés de travailler avec les nazis, y compris une
conception rudimentaire pour un ICBM avec lequel Hitler espérait bombarder
l’Amérique.
Le nec plus ultra en termes de
fusées a fait du chemin depuis le temps. Les soviétiques ont-ils suivi le
rythme du progrès ? Dans une moindre mesure, cela reste possible. Dans une
large mesure, ils n’auraient pas pu. Car ils attendent toujours qu’un autre
pays, souvent les USA, ait produit un nouveau concept qui fait ses preuves –
puis ils le copient, s’ils arrivent à mendier, acheter, ou voler les plans. À
l’évidence, c’est la manière la meilleur marché de faire les choses : vous
laissez une autre nation dépenser d’énormes sommes d’argent en R&D pour un
nouveau produit – que ce soit un système d’armement militaire ou une automobile
– puis vous le récupérez.
Un hic majeur dans le cas des
systèmes d’armement est que les USA ne sont pas près de fournir les schémas
d’ingénierie et les données techniques de ses derniers missiles et fusées
spatiales. Cependant, suffisamment d’informations – photographies, diagrammes
schématiques, et discussions – apparaissent ouvertement dans des revues sur les
techniques aérospatiales pour donner aux Russes assez d’indices les pointant
dans la bonne direction. Dans le pire des cas, ils peuvent copier les
configurations externes des missiles américains. Ce qu’ils ont souvent fait
pour mettre en avant des modèles d’expositions pour leurs parades. L’ICBM
Minuteman en est un exemple. Le missile balistique Polaris en est un autre.
Parfois ils copient les mauvaises choses, comme les missiles Redstone et
Jupiter – tous deux obsolètes et éliminés du stock de l’armée US. Pourtant des
versions mises à jour de ces deux derniers missiles ont été fièrement exhibées
dans les rues de Moscou lors de la célébration du 1er mai 1965.
En dépit de tout ceci, les
Soviétiques ont réussi à bâtir un mythe indétrônable de supériorité en termes
de puissance de missiles. Ils furent aidés dans l’établissement de ce mythe, dans
une large mesure, par la presse américaine. À un moment, il n’y a pas si
longtemps, la nouvelle la plus importante aux USA fut celle de « l’écart
des missiles. » D’après cette information, qui atteint son paroxysme sous
l’administration Eisenhower, les USA traînaient loin derrière la Russie en
termes de puissance de missiles. L’écart était tellement prononcé, selon le
journaliste de Washington Joseph Alsop, que l’URSS disposait de 500 ICBM avec
de dévastatrices têtes thermonucléaires installés sur des rampes de lancement,
leurs systèmes de guidage fixés sur des cibles aux États-Unis.
L’histoire causa une telle peur
que des enquêtes furent diligentées par le Congrès afin de déterminer ce que
l’Amérique devait faire afin de
rattraper cet écart et prendre la tête de la puissance en termes de
missiles avant qu’il ne soit trop tard. Des officiers militaires de haut rang
furent forcés de s’éloigner de tâches importantes dans le but de témoigner dans
ces commissions.
Un écart de missiles en faveur
des Russes ? Rien n’aurait pu être plus éloigné de la vérité. Il y a
quelques années de ça j’ai eu l’occasion d’interviewer Mr. Oliver M. Gale par
téléphone. Gale avait été Conseiller Spécial du Ministre de la Défense Thomas
S. Gates, Jr. Je lui posai la question à propos du soi-disant « écart des
missiles. » Voilà sa réponse :
« Vous pouvez comprendre
comment nous nous sommes sentis au Ministère de la Défense quand les
journalistes défaitistes racontaient que l’URSS avait 500 ICBM prêt à nous
tomber dessus – quand nous savions
que nos U-2 ne pouvaient trouver aucune
base de missiles. Et ils survolaient souvent la Russie. »
[…]
Il n’y a par conséquent pas eu
« d’écart de missiles. » Tout du moins pas d’écart en faveur des
Russes. Alors comment ont-ils réussi á convaincre le monde – la presse
américaine, le public, et le Congrès inclus – de leur géniale supériorité dans
ce domaine ? La chronologie expliquant comment on en est arrivé là est
fascinante.
[…]
[Les passages en gras sont le fait du traducteur]